L’auteur-compositeur-interprète Idir, figure incontournable de la musique kabyle, s’est éteint dans la soirée du 2 mai à l’âge de 70 ans. Il laisse un répertoire riche d’œuvres rendant hommage au patrimoine amazigh du pays et célébrant la vie ainsi que la diversité.
Né à Ait Yenni (une commune de Tizi Ouzou en Haute Kabylie), Idir, de son vrai nom Hamid Cheriet, est le fils d’un berger. S’il entreprend tout d’abord des études en géologie dans le but de se lancer dans une carrière au sein de l’industrie pétrolière, les poèmes et contes familiaux de son enfance lui insufflent également un intérêt profond pour les traditions orales de sa région natale.
C’est ainsi qu’en 1973, sa première chanson, la berceuse Rsed A Yidess (« Que vienne le sommeil ») est diffusée sur Radio Alger. A la suite de son service militaire, il signe chez le label Pathé Marconi en 1975 et lance l’année suivante son album au succès planétaire : A Vava Inouva (« Papa Inouva»). La chanson-titre de l’album est traduite en plusieurs langues et propulse la musique kabyle sur la scène internationale.
L’album, qui comprend aussi les chansons Azwaw et Zwit Rwit, est non seulement l’occasion d’une célébration de la culture orale kabyle, mais est aussi, avec une instrumentalisation simple (voix, guitare et flute), un hommage aux coutumes des villages de Kabylie. A Vava Inouva marque le début d’une longue carrière caractérisée par un mélange constant de l’art, de la valorisation du patrimoine et de la volonté de transmettre un message inclusif.
Le chanteur sort en 1979 l’album Ay Arrac-Negh (« Ô nos enfants ») et en 1993 l’album Les Chasseurs de lumière. En 1999, il collabore avec de nombreux artistes dont Gnawa Diffusion, l’ONB, Manu Chao, Maxime Le Forestier, Dan Ar Braz, Zebda et Geoffrey Oryema pour son album Identités, dont les morceaux racontent entre autres l’exil et les maux de l’Algérie durant la décennie noire. Avec Deux rives, un rêve (2002), il revisite certains de ses morceaux populaires et ajoute le morceau écrit par Jean-Jacques Goldman Pourquoi cette pluie, qui raconte le déluge d’Alger de novembre 2001 et la douleur issue de la décennie de violence qu’a connue pays. En 2007, il sort La France des couleurs, un hymne à la diversité. Il collabore alors avec des artistes qui incluent Zaho, Wallen, Akhénaton, Oxmo Puccino, ou encore Grand corps malade. Il avait plus récemment sorti en 2017 l’album Ici et ailleurs, comprenant des morceaux enregistrés notamment avec Francis Cabrel et Charles Aznavour.
Le sociologue Pierre Bourdieu affirmait qu’Idir « n’est pas qu’un chanteur, il est un membre de chaque famille qui l’écoute ». Les musiques et poèmes à portée universelle de l’artiste continueront à accompagner le quotidien des Algériens et véhiculent un message militant dont la pertinence demeure d’actualité.
Photo : L’artiste Idir pour son album Ici et ailleurs – Page Facebook officielle